L’Arrêt de la cour de sûreté de l’Etat (suite 2 chapitre 10)

L’Arrêt de la cour de sûreté de l’Etat (suite 2 chapitre 10)

27 Oct, 2015

Protais-Lumbu

Texte tiré de l’ouvrage : PROTAIS LUMBU 4. «Mon apport dans le Triomphe de la démocratie multipartiste’ »

Protais-Lumbu21

Protais LUMBU MALOBA NDIBA, Président de l’UDPS. Ph. « femmefortes.com »

A  R  R  E  T

 Les prévenus KIBASSA MALIBA, NGALULA MPANDANJILA, TSHISEKEDI WA MULUMBA, KYUNGU WA KUMWANZA, KASALA KALAMBA, NGOYI MOUKENDI, LUMBU MALOBA, LUSANGA NGIELE, KAPITA SHABANGI, KANANA TSHIONGO, MAKANDA MPINGA, DIA ONKEN A MBEL ET BIRINGANINE MWAGARUKA, sont poursuivis en qualité de co-auteurs, pour avoir dans les circonstances de lieu et de temps reprises dans la citation formé un complot dans le but de détruire ou de changer le régime constitutionnel établi ;

Le prévenu KYUNGU est poursuivi, en outre, pour avoir par paroles, manifesté de l’aversion ou de la haine tribale ou régionale ;

Quant au prévenu BIRINDWA il est poursuivi, pour avoir tenté de soustraire des documents de nature à faciliter la découverte des preuves d’une infraction contre la sûreté de l’Etat ;

Afin, les prévenus META, KABULE, KATOMPA ET MANGABU sont accusés en qualité de complices, pour avoir fourni aux prévenus poursuivis du chef d’infraction contre la sûreté de l’Etat un lieu de réunion, tandis que le prévenu SAMBWE est poursuivi également en qualité de complice, pour avoir mis à la disposition desdits prévenus un véhicule pour leur faciliter les déplacements dans leur tournée de sensibilisation de masses pour leur deuxième parti politique ;

R.MP. 3833.                                                – huitième feuillet –             R.P. 2322.

A l’appel de la cause, seuls les prévenus SAMBWE, META, MANGABU, KATOMPA et KABULE comparaissent en personne assistés de leurs conseils ; tandis que les autres prévenus, bien que régulièrement cités, ne comparaissent pas ;

 Enfin le prévenu BIRINGANINE ne comparait pas nonobstant, la citation régulière. La saisine de la cour est donc régulière à l’égard de tous les prévenus.

 

  1. F A I T S

 Il ressort des éléments du dossier de la cause et des débats à l’audience que pour avoir à la date du 1er novembre 1980 commis un manquement grave à la discipline du Parti, les treize premiers prévenus alors élus du peuple furent déchus de leur mandat et frappés des mesures de privation de leurs droits civique et politique par la commission permanente de discipline du comité central du Mouvement Populaire de la Révolution ;

Outre ces sanctions, les prévenus furent également astreints à s’éloigner de la Capitale et à résider dans leurs milieux d’origine ;

 Au courant du mois de décembre 1981, les prévenus furent autorisés à s’installer dans les milieux de leur choix à la suite de la levée des mesures d’assignation à résidence qui avaient été prise à leur égard. C’est alors qu’ils se retrouvèrent tous à Kinshasa au courant du mois de janvier 1982.

 Pendant leur séjour dans la capitale, les prévenus se réunirent à plusieurs reprises pour reflechir sur la situation du Pays. Au courant de l’une de ces réunins, ils aboutirent à la conclusion que la perte de leur mandat signifie leur exclusion du Mouvement Populaire de la Révolution  et qu’il fallait en conséquence trouver un autre cadre politique dans lequel ils pouvaient exprimer les vœux de leurs électeurs qu’ils croyaient encore représenter.

C’est pour ce motif que les prévenus décidèrent de commun accord de créer un second parti politique opposé au Mouvement Populaire de la Révolution, ayant pour objectif d’instaurer un ordre nouveau et dénommé  “ UNION POUR LA DEMOCRATIE ET LE PROGRES SOCIAL ” en abrégé “ U.D.P.S. ”.

Pendant que les prévenus étaient entrain de discuter les modalités pratiques de la mise en œuvre de leur parti, ils furent invités le 17 février 1982 par le Vice-Premier Commissaire d’Etat qui était informé par les services de sécurité de toutes les réunions tenues soit au domicile de NGALULA, soit à celui de TSHISEKEDI soit encore à celui de KIBASSA.

A cette date, le vice-Premier Commissaire d’Etat communique aux prévenus que l’Autorité politique était au courant de toutes leurs réunions tenues au sujet de la création d’un second parti politique. Il ajouta, qu’il possède même leur projet de société ainsi que leur statut. Il leur rappela le caractère anti-

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 constitutionnel de leur entreprise et qu’étant déchus de leurs droits civiques et politiques, ils ne pouvaient se livrer à aucune activité poitique. Il leur déclara qu’au lieu de les arrêter, l’Autorité politique préferait les approcher pour les mettre en garde et les dissuader de poursuivre leur dessein anticonstitutionnel.

Après avoir remercié le Vice-Premier Commissaire d’Etat, le porte-parole du groupe, le prévenu KIBASSA MALIBA, répondit qu’il allait se concerter avec les autres membres pour donner une suite à la communication qui venait de leur être faite.

Conformément à cette promesse, le prévenu KIBASSA MALIBA revint au Cabinet du Vice-Premier Commissaire d’Etat à la date du 20 février 1982 accompagné notamment de coprévenus NGALULA, TSHISEKEDI pour donner la réponse promise.

Pour toute réponse, les prévenus remirent au représentant de l’Autorité une lettre destinée au Président de la République par laquelle ils l’informaient de l’existance de leur parti politique et lui demandaient une rencontre en vue d’harmoniser leurs points de vue sur la prochaines élections. Un appel à l’ordre leur fait à cette occasion par cette Autorité qui insista sur le caractère anticonstitutionnel de leur entreprise, et leur réitera le contenu de sa communication du 17 février 1982.

Inquiétés par leur propre acte et surtout par le fait de se sentir étroitement surveillés par les éléments de la sécurité nationale, le prévenu KIBASSA et quelques membrtes de son groupe rentrèrent au Cabinet du Vice-Premier Commissaire d’Etat aux fins de tenter d’obtenir une nouvelle rencontre. Ce dernier s’étant rendu à un deuil dans la Région de l’Equateur, les prévenus furent reçus par le Conseiller diplomatique du Président de la République auprès de qui ils posèrent la question de la sincèrité des intentions du pouvoir.

Après avoir assuré au groupe qu’il ne sera pas inquiété dans sa liberté d’aller et de venir, le représentant de l’autorité insista de nouveau sur le respect de la constitution et leur conseilla de mettre leur projet de côté et d’entamer plutôt les démarches en vue d’obtenir le recouvrement de leurs droits civiques et politiques.

Au lieu de se conformer à toutes ces directives répétées par le Représentant de l’Autorité au cours de toutes les trois rencontres, les prévenus se mirent à sensibiliser une partie de l’opinion autour de la création du deuxième parti politique.

C’est ainsi qu’à leur arrivée à Lubumbashi en date du 28 février, les prévenus KIBASSA et LUMBU, dont l’objet du voyage au Shaba était d’ordre familial, transformèrent leur séjour en une véritable randonnée politique à travers les zones de Lubumbashi et Likasi.

 En effet, accueillis à l‘aéroport International de la Luano par  le prévenu KYUNGU wa ku MWANZA, les prévenus KIBASSA et LUMBU se rendirent au domicile de leur hôte en vue de préparer

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 ensemble un plan de sensibilisation des populations du Shaba sur le dauxième parti politique. Réjoins par le prévenu LUSANGA qui demeure à Likasi, le groupe décida des’adresser aux masses pendant la période allant du 28 février au 12 mars 1982 dans les bars “ LAS VEGAS ”, “ MEXICO ”, “ KIBOLIA ” à Lubumbashi, “ DODO ” à Likasi ainsi qu’aux domiciles de certains sympathisants notamment META et MANGABU.

Tous les déplacements à cet effet, furent assurés par le prévenu SAMBWE qui mit sa voiture à la disposition des prévenus durant tout leur séjour au Shaba.

A toutes les rencontres, les prévenus KIBASSA, KYUNGU, LUMBU et LUSANGA invitèrent la population à adhérer massivement à leur parti “ U.D.P.S.”,  ils prononcèrent à cette occasion un réquisitoire sévère à l’égard du Mouvemet Populaire de la Révolution et de son chef qu’ils rendirent responsables de tous les maux dont souffre le pays et promirent à la population l’avènement d’un ordre nouveau, la fin de la pénurie et le commencement de l’abondance, la fin de la misère et le commencement du bonheur, c’est-à-dire la fin de l’esclavage et le commencement de la liberté.

Dans le même ordre d’idées, le prévenu KYUNGU dont les critiques à l’égard du Parti M.P.R. ont été les plus acerbes accusa les kinois d’acheter les avions avec la richesse provenant de la Région du Shaba au moment où la population locale croupit dans la misère.

Pendant le séjour du prévenu KIBASSA et sa suite au Shaba, les autres coprévenus notamment TSHISEKEDI et NGALULA demeurés à Kinshasa amorcèrent aussi la campagne de sensibilisation sur l’existance de leur deuxième parti chacun dans son cercle d’amis.

Dans cette optique NGALULA contacta le citoyen LIHAU pour lui demander de réflechir sur les éléments pouvant composer les statuts du nouveau Parti et le prévenu TSHISEKEDI à son tour contacta le coprévenu BIRINDWA.

 Quant au prévenu KYUNGU, il résulte des éléments de l’enquête qu’après la levée des mesures d’assignation à résidence qui lui ont été inflgées par la commission de discipline du Comité Central, ce prévenu regagna Kinshasa où il se retrouva avec ses collègues anciens parlementaires ainsi qu’avec le prévenu KIBASSA MALIBA.

 Après un bref séjour dans la Capitale, ce prévenu se rendit à Lubumbashi lieu de son principal établissement.

 Après un mois de séjour dans cette ville, il fut réjoint par le prévenu KIBASSA et LUMBU à la date du 28 février 1982. A partir de cette date de concert avec KIBASSA MALIBA, LUMBU et LUSANGA, le prévenu KYUNGU effectua une randonnée politique à travers les zones urbaines de Lubumbashi et de Likasi. C’est au cours de cette randonnée que le prévenu articula  comme dit plus haut les critique acerbes à l’endroit du Mouvement Populaire de la Révolution et son Chef.  

Outre ces critiques, le prévenu tint publiquement les propos de nature à entretenir une certaine tension entre tribus ou régions. C’est ainsi qu’au cours d’un meeting tenu au bar “ MEXICO ”,

 

R.M.P. 3833.                                                      – onzième feuillet –                           R.P. 2322.

 le prévenu KYUNGU déclara publiquement que l’argent du Shaba est toujours transféré à Kinshasa et que les Kinois payent des avions avec cet argent alors que la population locale croupit dans la misère.

 En ce qui concerne le prévenu BIRINDWA, il convient de noter qu’à la date du 13 mars 1982, le prévenu fut surpris et arrêté au moment où il tentait de sortir du domicile du prévenu TSHISEKEDI. Lors de cette arrestation, il fut trouvé dans sa voiture un certain nombre des documents jugés séditieux notamment la lettre adressée au Président de la République et se rapportant à la création du deuxième Parti politique, la lettre que les prévenus TSHISEKEDI, NGALULA, KANANA, et MAKANDA avaient écrite pendant leur séjour à Kisangani adressée également au Président de la République par laquelle ils avaient demandé une rencontre, un document intitulé “ Un deuxième parti zaïrois ” dans lequel BIRINDWA décrit son projet de société conçu par lui et enfin une note à l’intention du Vice-Premier Commissaire d’Etat signée de la main de KIBASSA MALIBA (cote 1 à 40 ).

Interrogé au cours de l’instruction préparatoire sur les raisons de sa présence au domicile de TSHISEKEDI le prévenu déclare s’y  être rendu en vue de discuter avec ce dernier des termes d’une lettre qui devait être envoyée au Président de la République pour lui demander la liberation de KIBASSA et celle de trois autres personnes arrêtées avec ce dernier à Lubumbashi. En ce qui concerne l’origine des documents trouvés entre ses mains, le prévenu soutient que ceux-ci lui appartiennent et n’ont pas été retirés du domicile de TSHISEKEDI.

Pour ce qui est des personne SAMBWE DIANDA, META, MANGABU et KABULE, il y a lieu de signaler que peu après la réception qui a été organisée en l’honneur du prévenu KIBASSA MALIBA par le coprévenu KYUNGU à Lubumbashi, le prévenu KIBASSA se rendit au bar “ LAS VEGAS ” où de concert avec LUMBU et KYUNGU il a annoncé aux populations réunies à cette occasion l’existence d’un deuxième parti politique dénommé “ l’U.D.P.S. ” après avoir fait un requisitoire sévère à l’égard du Mouvement Populaire de la Révolution et de son chef.

S’agissant d’un meeting qui a été tenu par un ancien Commissaire politique élu de la ville de Lubumbashi et compte tenu du caractère particulièrement subversif des critiques qui ont été articulées à l’égard du Parti, la nouvelle de l’arrivée de KIBASSA et des propos qu’il tenait se répandit rapidement à travers la ville.

C’est dans ces conditions que la prévenue META qui avait d’ailleurs rencontré KIBASSA au domicile de KYUNGU ainsi que les prévenus KABULE et MANGABU furent informés de cette nouvelle.

Spontanément, ces prévenus invitèrent KIBASSA et son groupe à tour de rôle dans le cadre prétendument familial ou amical.

Au cours de toutes ces réceptions organisées dans les domiciles de ces trois prévenus, KIBASSA continua à faire des déclarations politiques au sujet du deuxième parti.

 

R.MP. 3833.                                                      – douzième feuillet –                         R.P. 2322.

 Pour ce qui a trait au prévenu SAMBWE, il échet de relever que lors de l’arrivée de KIBASSA MALIBA à Lubumbashi, ce prévenu se rendit à l’aéroport en vue de l’accueillir. De l’aéroport, ils se dirigèrent chez KYUNGU où une reception était déjà apprêtée en l’honneur de KIBASSA.

Après cette réception, le prévenu SAMBWE mit sa voiture à la disposition du prévenu KIBASSA et de son groupe pour leurs déplacements à travers les zones urbaines de Lubumbashi et Likasi.

Enfin quant au prévenu KATOMPA, il résulte des procès-verbaux de l’O.P.J. instrumentant qu’au cours d’un meeting populaire tenu par KIBASSA, LUMBU, KYUNGU et LUSANGA au bar DODO à Likasi, ce prévenu qui est au service du prévenu LUSANGA en qualité de Barman se trouvait dans la foule des curieux venus entendre les déclarations politiques de leurs anciens élus. Pendant que ces derniers informèrent le public de l’existence d’un deuxième parti politique dénommé U.D.P.S. et invitaient la population à adhérer massivement à ce parti, le prévenu KATOMPA poussa des cris “ Vive l’U.D.P.S., vive l’U.D.P.S. ”.

A la suite de ce comportement incivique, le prévenu fut arrêté et traduit en justice.

A suivre